vendredi 19 novembre 2010

La jeune fille à la perle, le film

On m'a appris, il y a quelques temps qu'il fallait observer intensément les premières minutes d'un film, parce qu'en général elles comportaient la suite en elle. Comme au théâtre, ces premières scènes ont donc une fonction programmatique. Que peut-on observer au début ? Gagnera -t-on en affirmant qu'on peut tout deviner dans les cinq premières minutes ? Et bien si on prolonge à 6 minutes, cela pourrait marcher !

Le début du film :

Un geste minutieux, mécanique d'une main épluchant des légumes. Serait-ce provenant d'un esprit délicat et sensible l'anticipation de la peinture ? L'héroïne n'a pas besoin d'un pinceau, elle est déjà prédisposée à voir le monde d'un regard particulier, désintéressé et contemplatif. Ainsi faire la cuisine n'est plus une corvée ou une activité des plus triviales, cela correspond, par sa main à une action créative et artistique. Évidemment, on remarque, l'apparition des couleurs avec les oignons, les carottes et les betteraves ou choux. On distingue l'activité de loin, à travers un intelligent jeu de clair-obscur (qu'il aurait été décevant de ne pas mettre en valeur dans un film dont le sujet est la peinture) Enfin, nous distinguons le visage de Griet qui vérifie nos suppositions. Elle dispose avec soin les aliments, comme elle saura le faire pour la chaise devant la fenêtre. Ce personnage a un profond besoin d'harmonie, les objets qui l'entourent, ses paroles ou ses gestes doivent tous être mesurés et en accord avec l'ensemble.

Les lumières sur la ville hollandaise, cette extraordinaire capacité que le soleil a de se rendre présent malgré les nuages est plutôt bien rendue. On comprend pourquoi les peintres hollandais étaient fascinés par la lumière.

Il manque encore, me direz-vous le désir non-exprimé entre le peintre et la jeune fille. Et bien je crois que l'atelier le symbolise. Cette pièce est interdite, inaccessible, fabuleuse. Elle effraie mais elle attire aussi. Personne ne sait ce qui s'y passe, on devine seulement que dans cet espace un autre monde prend vie, un monde que la famille de Vermeer ou les autres servantes ne pourront jamais comprendre. On pourrait généraliser cela à l'atelier du poète, l'atelier de l'écrivain, du scénariste ou du compositeur de musique.  Ce cabinet des merveilles arrive donc à la sixième minute, tous les élements principaux du film sont mis en place. CQFD !!!!

Quelques thèmes ou remarques par-ci par-là...

Musique et silence :

La musique (très joliment composée par Alexandre Desplat) n'en fait pas trop, elle sait se faire discrète et se garde bien de dépasser son rôle : l'accompagnement de l'image. Un juste dosage avec
le silence, c'est réussi, c'est une qualité que j'apprécie tout particulièrement.

Le regard
J'adore le regard de Scarlet Johansson, elle fait passer l'émerveillement devant les toiles, des yeux sincères qui contemplent éblouis d'admiration... Griet a toujours un regard fuyant, elle a toujours peur que ses yeux en rencontrent d'autres mais quand elle observe la nature ou un tableau, elle s'y immerge totalement, sans aucune limite. A cet instant, on peut apercevoir soin âme. C'est probablement pour cela qu'elle préfère garder une distance avec les humains. 
La symbolique des cheveux  :

Ils sont toujours dissimulés, elle ne les montrera pas au boûcher, seul Vermeer les verra. Sur le plan historique le cheveu représente la féminité mais surtout l'intimité, c'est ce qui nous intéresse ici. D'ailleurs Griet reste distante du petit boûcher, la servante croît qu'elle pense à lui mais en réalité elle observe les nuages, tente d'en comprendre le mystère. Elle se sent de plus en plus étrangère à ce monde contingent, comme si elle en était spectatrice. C'est pourquoi elle ne saute pas de joie quand son amant lui propose un travail. Rien ne peut plus être comme avant pour elle, elle voit le monde d'un regard si différent des autres. Griet se méfie d'autrui, elle évite les contacts trop personnels, c'est pourquoi deux mains qui se touchent sont si exceptionnelles. Ca prête à sourire parce que ça semble dépassé dans notre société, deux mains qui se frôlent, c'est drôlement torride !! Mais cela révèle beaucoup sur les rapports humains et sur la personnalité de Griet, elle a compris que chaque détail était important en société, qu'il fallait mesurer chaque geste et qu'on ne devait pas en écarter la symbolique. Cette sensibilité constitue l'intelligence du personnage.
  
  
 La lumière
 
Le film a misé sur la lenteur, ça correspond au sujet alors ce n'est pas forcément une mauvaise chose. (au contraire, ça fait du bien parfois de prendre le temps pour observer sans aucun but ou arrière-pensée. On est tellement habitué à voir défiler les images à la TV ou sur internet qu'on ne prend plus le temps. Voilà pourquoi ce tableau ne m'avait pas encore marquée...) J'ai apprécié le traitement des images (et le silence bien sûr, parce qu'en fait c'est une musique, le silence), des couleurs et de la lumière mais ils auraient pu faire encore mieux en effet l'histoire est recentrée sur la relation de Griet et du peintre. Il a donc été choisi de représenter un court laps de temps. Peut-être les saisons et le soleil auraient pu être encore mieux exploités. (bien qu'après avoir vu le film une deuxième fois j'ai trouvé des subtilités qui ne m'étaient pas apparues)

L'hiver : il s'impose peu à peu et devient le cadre de la passion réprimée, interdite. (passion pour la peinture qui se confond sans qu'on puisse en faire la différence avec le désir entre Griet et Vermeer)

 La société :
-La vilaine fille de Vermeer joue le rôle du losangier qu'on trouve dans les contes du Moyen-Age, en gros le vilain nain qui passe son temps à espionner et à mettre des bâtons dans les roues du héros !

- L'opposition de la société aux valeurs artistiques à travers deux personnages : la femme de Vermeer (quelle condescendance, il est vraiment très facile de la détester !) et Griet.

Contingence du monde face à la simplicité, la beauté extrême de la nature, qui nous fascine.

- Le personnage de la grand-mère : à mon sens elle peut comprendre l'art, bien plus que sa fille mais elle représente la vision cynique du monde, tout doit être rentable, on doit avoir une bonne situation en société, gagner de l'argent et respecter les mœurs de l'époque.

- Assez ironique la bonne qui s'attriste parce que les voisins sont ruinés. En tant que servante, elle pourrait se détacher de ces problèmes, d'autant plus qu'elle s'inquiète pour l'humeur de Madame... Mais l'attachement qu'ont les petites gens pour la bonne société et leurs maîtres est solidement enracinée. On n'est encore qu'au XVII ème siècle...

Vermeer : J'ai beaucoup parlé du personnage de Griet mais peu de Vermeer, il est intrigant, peut-être même effrayant à être toujours tapi dans l'ombre. Ce personnage est complexe et difficile à cerner. Il navigue entre les mondes, il n'aime pas sa femme mais le moins qu'on puisse dire c'est qu'il continue à honorer son mariage ! Il est captivé par Griet mais on nous rappelle l'histoire sordide de son ancien modèle. Quelle vision de l'artiste nous propose le film ? Artiste incompris qui n'a pas sa place dans le monde, homme faible qui ne sait imposer sa propre volonté et qui cède aux caprices de sa femme ou pervers obnubilé par les jeunes servantes qu'il impressionne et utilise comme modèles... La question reste ouverte, je crois que chacun peut se faire sa propre idée. En gardant bien sûr à l'esprit que ça ne représente que le Vermeer fictif, celui réinventé par le livre ou le film... Mais peu importe parce que ce désir partagé par le peintre et la jeune fille, en dehors des sentiments amoureux est avant tout une passion commune pour la peinture. La boîte noire les émerveille tous les deux de la même façon. Cela nous montre que pour être artiste il ne faut pas nécéssairement peindre, être artiste c'est avoir une vision du monde, un regard désintéressé, naïf peut-être. Ainsi, Griet est une artiste, et Vermeer en a conscience. C'est cette compréhension mutuelle  qui rend leur relation touchante, elle est le moteur du film.

la jeune fille à la perle-film

vendredi 5 novembre 2010

Génériques en série...

On peut distinguer plusieurs catégories mais on commencera par... le commencement !

Ainsi j'ai choisi deux séries d'un autre siècle pour introduire le sujet : Amicalement vôtre (hommage à Tony Curtis) et Mission impossible (la fameuse allumette)

Amicalement vôtre, classique, une musique culte.

Mission impossible avec les premiers acteurs. Du grand art, ça peut sembler dépassé : tous les codes de la série n'étaient pas encore mis en place dans les premiers épisodes, si l'ensemble paraît long c'est seulement par rapport au rythme auquel on est habitué ou aux effets spéciaux mais cette série est une première du genre, elle a marqué l'ensemble du cinéma d'espionnage. Les intrigues, Jim, les personnages vus par le trou d'une serrure, les plans rapides, les cut ... on leur doit beaucoup !

Maintenant penchons-nous sur la fonction du générique : 

D'un côté il nous délivre des informations sur la fiche technique : acteurs ou producteurs, c'est-à-dire qui se cache derrière cette merveilleuse illusion...j'ai nommé l'écran (petit ou grand) ! De l'autre, il nous donne un premier aperçu des personnages et de l'ambiance de la série. A la télévision comme au cinéma, c'est une frontière entre le réel et le rêve, cette transition vous permet donc d'accéder à un univers imaginaire.

 

Les différentes formules :

- La voix off, exemples : The Dead zone, the Pretender, John Doe, Jeremiah (Jérémiah, apocalypse et renaissance ).



 "Vous devriez voir ce que je vois" J'adore... suivi de "New Year's Prayer" de Jeff Buckley

Erreur fatale ! J'oublie la deuxième version du générique à partir de la saison 4, cet air de Blues Saraceno se fond à merveille dans l'ambiance de la série. Deuxième générique

Et côté comédies My name is Earl

- L'absence de générique, plus exactement sa réduction  : Lost (envoûtant), Heroes,

The mentalist, Kyle XY, Breaking bad (tout en chimie)... succin mais efficace, cela permet une immersion rapide, une arrivée dans le vif du sujet.

Dans cette catégorie j'ai sélectionné Fringe :

 

- le lancement tardif : Ugly Betty (qui aurait pu figurer dans la catégorie précédente)



Les génériques sont nombreux, très nombreux, c'est pourquoi je n'ai sélectionné que les plus originaux ! Mais vous pouvez en télécharger sur ce site : Génériqueséries Ou simplement écouter leurs musiques sur Coucoucircus. (émissions TV comprises)

 

Les plus inventifs : 

 

Ces génériques possèdent leur propre valeur, ils sont une œuvre à part entière. Le classement (non exhaustif, c'est vrai dans le fond un classement c'est ridicule, et vous n'imaginez pas combien il a été dur de réaliser celui-ci !!)

  1. Dexter (analyse)

 

2- Six feet under (j'aime le nom du créateur, Alan Ball sur une pierre
tombale ! )

3- Mad men


4-Chuck

5-Desperate housewives (ce générique reflète pour moi la meilleure saison : la
première)

6-Dead like me (Dead like me )

7-True Blood (on retrouve Alan Ball)

8-Ghost whisperer

9-Pushing daisies

10-Damages


11-The big bang theory


12-Episodes


13-Nip Tuck

14-Mysterious ways. 

 

Un générique, une chanson

Mais certains génériques, plus classiques misent sur des extraits d'épisode accompagnés d'une chanson, celles-ci deviennent souvent cultes (un sacré coup de pouce pour leurs auteurs )

Exemples : Friends (I'll be there for you ♪),  Ally McBeal où Vonda Shepard interprète l'intégralité des chansons diffusées, Prison Break (version française "J'ai pas le temps" de Faf la rage), Smallville ("Save me" de Remy Zero),  Veronica Mars ("We used to be friends" des Dandy Warhols), Malcom (You're not the boss of me now...♪), Roswell ("Angel" de Dido),  Dawson's creek ("I don"t wat to wait" de Paula Cole), One Tree Hill ("I don't wanna be" de Gavin de Graw) ou Monk (Au revoir Monk... )



Edit : Si la plupart des génériques à chanson sont moins recherchés que les autres, ce n'est pas toujours le cas, la preuve avec le générique de Weeds que je trouve excellent. (les paroles ne pourraient mieux correspondre à l'histoire)

Un générique, une ambiance

 

Ceux qui vous immergent le mieux dans l'ambiance de la série, par leurs chromatiques et leurs
bandes son :

Les 4400, Cold case, Medium, Prison Break (vo), Buffy, Angel (Angel, la BO "Live fast, die never" ), Dead Zone, Dark Angel, X files (comment oublier cet air ?!)



Et j'adore tout simplement : How I met your mother, NCIS (rythmé), les Simpsons.Je conclurai, comme j'ai commencé, avec une série culte : Mac Giver !!






Generique - Mac Gyver

envoyé par bebel49. - Les dernières bandes annonces en ligne.

P.S. Allez...avouez vous êtes en train de chanter "tin tin tin, tin tin tin... ♪"

vendredi 15 octobre 2010

Morts en séries...

Il me semble que le meilleur cadre pour représenter la mort est un épisode de série TV. Généralement, on s'est attaché aux personnages car l'on  suit leur quotidien sur plusieurs épisodes. C'est donc un format plus proche de notre vie que celui des films. De plus un épisode peut être entièrement consacré à cette perte, sans avoir besoin d'introduire les personnages ou de développer d'autres intrigues. Ainsi on peut entrer soudainement dans le sujet, tout comme le personnage face à la mort.
Or les séries dramatiques sont nombreuses et l'on ne compte plus les personnages tués.
La plupart, même si elles sont bonnes ne se montrent pas très fines dans leur mise en scène de la mort. Certaines peuvent être touchantes, marquantes mais elles ne donnent pas autant forme à la mort.  On a souvent droit à l'enterrement sous la pluie, les regards éplorés, les parapluies et la vie qui reprend son cours. L'ambiance n'est pas si différente des autres épisodes, on nous présente seulement un drame de plus...en revanche certaines séries se sont montrées d'une justesse extrême... Ainsi malgré les dizaines d'enterrements bouleversants, il sera pour moi difficile d'atteindre le niveau de Joss Whedon...
(Il est bien évident que Six feet under excelle dans le domaine puisqu'il s'agit de sont thème principal mais la série mériterait à ce propos un article spécial.)
Voici donc mon classement des trois meilleurs épisodes mettant en scène la mort.
1- The Body (Orphelines)- La mort de Joyce Summer dans Buffy The Vampire slayer.
Lien de parenté : la mère de Buffy [Episode 16 saison 5]
2- Cold Ground (Lourde absence)- La mort d'Adèle Stackehouse (épisode 6 saison 1) dans True Blood. 
Lien : la grand-mère de Sookie [Episode 6 saison 1]
  
3- The Long goodbye (Tchao Bambins) -La mort de Mitch Leery dans Dawson's creek.
Lien : père de Dawson
[Episode 4 saison 5]
 
Les titres originaux The Body ou Cold ground sont les parfaits reflets des épisodes. The Long goodbye est moins original mais très beau... La traduction française est moins judicieuse. (surtout pour Buffy...)
Au delà des différents thèmes abordés, l'ambiance de l'épisode est primordiale, ils nous présentent tous à travers un traitement réaliste (plans, son, couleurs...) une atmosphère particulière inédite. Ce la peut paraître surprenant mais on retrouve presque toujours le soleil presque agressif, le ciel bleu sans un seul nuage et le silence assourdissant. Ainsi on ne peut plus faire appel à la mélancolie ou aux discours pathétiques sur fond de pluie, il faut représenter le choc dans toute son immédiateté. Bref dans ces épisodes peu de grands discours, de larmes ou de lamentations... Toujours le silence... (enfin estimé à sa juste valeur) On découvre ensuite la dimension absurde de la mort qui surgit au cœur du quotidien, celui -ci continue sa route, imperturbable...
Étudions maintenant ces séries...
Dans Buffy The Vampire Slayer, la mort de Joyce ne s'apparente à rien de surnaturel, les personnages sont donc totalement impuissants, cette mort ne peut être analysée ou expliquée. C'est ainsi, c'était écrit dirait Jacques le fataliste. Ils ne peuvent donc en accuser personne, à part Dieu, une instance supérieure. Plus tard, Dawn essaiera de ramener sa mère à la vie, elle ne parviendra qu'à créer un zombie qu'on ne verra jamais afin de préserver l'image de la mère disparue. On ne peut défaire par le surnaturel que ce qui a été entrepris par le surnaturel.
Cet épisode est d'un silence surprenant, très peu de musique, très peu de paroles. Buffy qui rentre chez elle, qui découvre sa mère morte... comme si c'était irréel, hors du temps, d'un réalisme étonnant. Cet épisode est
anthologique. 
Les personnages ne semblent tout d'abord pas si affectés de la mort de leur proche (comme s'en étonnent des secondaires simplets qu'on aurait envie de décapiter !), mais un élément leur fait toujours réaliser la perte subie. Pour Sookie il s'agit de la tarte de sa grand-mère, pour Dawson la voix de son père sur le répondeur. Les réceptions funèbres dans True Blood ou Dawson apparaissent dans toute leur vanité, leur non-sens et leur dérision.
 
Sookie  a besoin de nettoyer le sol, elle éponge consciencieusement le sang de sa grand-mère. (l'horreur commence avec le chat léchant le sang sur le sol) Elle le fait froidement, elle ne ressent strictement plus rien. C'est une réaction bien plus intéressante et réaliste que ce qu'on a pu voir ailleurs.
Buffy dit au téléphone : "C'est ma mère, elle respire pas. Non, elle respire pas. " En réalité elle sait qu'elle est morte mais elle ne peut le dire car ce serait l'admettre, et le rendre réel.
Avec notamment le gros plan subjectif du téléphone, chaque détail ou mouvement est passé au crible fin, chaque son devient important à travers un silence assourdissant. On se retrouve dans une petite banlieue calme, qui continue à vivre. On imagine les personnes âgées dans leur jardin, on s'en rapproche et on entend très vaguement des notes de musique mais on sait que dans la pièce voisine le corps de Joyce est toujours là, les yeux ouverts. Le drame si improbable prend place au milieu d'une maison ensoleillée, au milieu du quotidien le plus banal.
"Giles, venez chez nous, elle est à la maison." et Buffy raccroche.
Avouons qu'il n'y a pas plus dramatique pour le spectateur que la scène imaginée par l'esprit de Buffy : sa mère est réanimée, on assiste à la surprise des ambulanciers. Mais ce n'est qu'un songe. On sait, elle sait qu'il n'y a rien à faire mais on espère toujours qu'une solution surgira, que ce corps inerte pourtant destiné au mouvement se relèvera, que ses pupilles faites pour recevoir la lumière se rétracteront.
Car à l'instant de la mort, le choc n'apparaît que par son aspect irrémédiable. Cette situation de non-retour paralyse le personnage. Buffy imagine sa mère déclarant. "heureusement tu m'as trouvé à temps" mais à partir de la situation qu'elle vit, Buffy sait que ce miracle n'a aucune chance de se dérouler. La vie de Buffy devra donc changer radicalement...
Les lèvres de l'ambulancier s'animent mais les paroles sont détachées de tout sens.
"Je vous présente toutes mes condoléances." Elle répond "Merci". Une formule de politesse, un automatisme. Les mots perdent leur sens, on est totalement déconnecté du monde. Comme physiquement blessée, Buffy est anesthésiée, elle ne peut plus réfléchir ni ressentir autre chose que le vide. Il y a quelques minutes elle parlait encore à sa mère. Elle est encore vivante dans son esprit car le contraire n'est pas imaginable pas pour une personne qui a toujours appartenu à sa vie. Ce serait absurde, comme passer dans une rue qu'on voit tous les jours et découvrir qu'en une nuit tout a changé.
Le corps de Buffy rejette aussi cette situation, elle vomit.
Giles s'approche de Joyce, Buffy panique, lui dit de ne pas y aller, non, il faut attendre. Et elle prononce l'imprononçable. "Il a dit qu'il ne fallait pas bouger le corps". Elle est horrifiée par ces mots. Il n'y a plus sa mère, seulement un corps. Celui-ci bénéficie d'un plan cinématographique. Le Gros plan sur le visage me rappelle Psychose. Ce corps est totalement inerte on entend ses côtes se fêler sous un massage cardiaque inutile. L'être humain devient alors un objet.
Dans True Blood, la tarte est symbolique, c'est le dernier élément qu'il reste de sa grand-mère, un élément vivant car le plat est périssable. Sookie se contient, elle est polie avec les invités, elle ne pleure pas. Très aimable elle remercie, range les plats apportés et reste assise dans la cuisine sereinement. Mais quand une grossière invitée s'empare de la tarte de sa grand-mère, elle hurle. L'objet sacré est profané. Dans quelques jours, Sookie ne pourra plus manger quelque chose préparé par sa grand-mère. (on retrouve cette obsession dans OTH avec Haley qui veut absolument reproduire à l'identique la soupe de sa mère, hélas, cet épisode est trop chargé on ne se concentre pas sur Haley or la mort d'un personnage doit s'étendre sur chaque mouvement, chaque action, ça doit nous posséder). Enfin, Sookie se déshabille, dénoue ses cheveux, c'est comme si elle muait pour trouver une nouvelle peau, véritable métaphore du travail de deuil. Elle quitte ainsi le monde réel, son passé, son enfance rassurante pour un monde adulte, étrange surnaturel, parfois inquiétant celui de Bill et des vampires.
Dans Dawson's creek, je me souviens surtout du héros parfaitement poli avec les invités, aidant toujours sa mère, répondant à toutes les sollicitations. comme Sookie, au début de la réception. (une grande mascarade hypocrite, écœurante et insignifiante à Bon temps ce qui  est moins marqué chez Dawson qui possède des amis réels, amis réels qui sont pourtant eux aussi bien insignifiants comparés à la mort, impériale et toute puissante)Le répondeur se mettant en route est un passage plutôt cruel. C'est à ce moment que Dawson craque... Pour le reste on observe moins de violence psychologique mais la réaction du personnage est abordée à de nombreuses reprises durant la saison, on le voit dans un  long travail de deuil. Ce n'est pas résolu en deux épisodes, comme par magie. Quand on croît que tout a repris son cour, on revient sur Dawson  et Mitch.
Bref, dans ces trois séries on commence par une atmosphère  calme, un soleil rayonnant. Puis les personnages montrent un certain détachement, marque du déni ou de l'auto-anesthésie. Le vide nous emporte alors dans sa chute jusqu'au moment où un élément nous ramène à la cruelle réalité. Cette réalité ne nous est pas étrangère car Buffy TVS ou True Blood ont eu l'intelligence de situer ces drames dans un plan non surnaturel. Pour Sookie, il faudra néanmoins trouver l'assassin de sa grand-mère (un humain sans aucun pouvoir) on se situe donc dans une bataille contre le mal, dans un décès motivé. (par une folie meurtrière mais tout de même motivée) En revanche Buffy et son entourage n'ont aucune enquête à réaliser, on réalise que cette bataille est pour Buffy bien plus dure que celle contre les vampires. Ici, rien n'est ni bien ni mal. Mitch a eu un accident de voiture, ce qui le détache légèrement de la fatalité. Chez Dawson on étudiera davantage le deuil, la mort est moins condensée dans l'épisode. C'est pourquoi le décès de Joyce restera pour moi le plus perturbant et réaliste des épisodes mettant en scène la mort. C'est ce qui fait de Buffy TVS une série d'anthologie.
La vidéo :



P.S Je conclurai en ajoutant un exemple à ma petite théorie : à la télévision les meilleurs morts ou enterrements sont ensoleillés !

Voici donc les dernières heures  de Jen Lindley dans le final de Dawson's creek. (toujours un grand soleil !!). Un épisode que je devais au moins évoquer...

Quant aux décès marquants de personnages, Allocine en a cité quelques uns sur cette page (quel euphémisme, ils en ont recensé 55 !) Les morts les plus marquantes.
L'accident de Marissa dans The OC (Newport Beach) est un moment mémorable, pour une fois Halelujah de Jeff Buckley est utilisée à bon escient. Si mes souvenirs sont bons, on n'assiste pas à
l'enterrement... (on passe quelques mois entre la saison 3 et la saison 4) La mort de Mark Green dans
Urgences était également des plus émouvantes, un épisode très réussi.

dimanche 6 juin 2010

Au revoir Monk...



Si la série porte le nom de son personnage principal, ce n'est pas sans raison. Certains êtres de fiction sont plus marquants que d'autres, différents, plus touchants, plus vrais. Monk en fait partie. Fin 2009, il se retirait un sourire sur les lèvres...  Après ces 8 années en compagnie du détective quelques mots s'imposent...
Tony Shalhoub n'a pas failli en huit ans... Son talent et son charisme ont non seulement porté la série mais aussi soudé une équipe.

Le départ d'un personnage principal, en l'occurrence Sharona est souvent un tournant délicat mais cela n'a pas atteint le charme de la série et lui a même transmis une nouvelle fraîcheur. Si l'on parle peu de la première assistante et de son fils dans les saisons suivantes les scénaristes ont toutefois pensé à lui accorder un clin d'œil dans le dernier épisode.  (une attention appréciable, qui apporte une cohérence à la série) Sharona était la première à aider Monk, à le soutenir...
On se doutait qu'elle devait partir, son passé amer lui donnait envie de découvrir le monde, de s'émanciper, bref de retrouver une vie normale, adjectif qui ne correspond bien évidemment pas à Adrien Monk ! Pour Nathalie c'est différent, la mort de son mari, sa capacité à comprendre le détective  la rendent irremplaçable.
Elle a su élever seule sa fille après la mort de Mitch. Encore un mélodrame à l'américaine ? Certainement pas, c'est Monk !  La douce tristesse se glisse au travers d'une légèreté libératrice. Le ton décalé est toujours subtile, Natalie en mère très protectrice a su combattre son chagrin pour apporter une vie équilibrée à sa fille. Toutes les deux, telles les filles Gilmore sont donc restées unies. Toujours drôle, Natalie forme avec Adrien un duo exemplaire, elle le
comprend, ne critique pas ses phobies tout en le poussant à s'ouvrir. (peut-être plus subtilement que Sharona) Elle et Julie apportent de la vie chez Adrien, ils forment ainsi une drôle de famille.  Ben, le fils de Sharona trouvait Monk trop étrange, au contraire Julie l'aime comme il est. Natalie aide le détective mais dans un sens elle a autant besoin de lui, c'est ensemble qu'ils affrontent le monde, soignent leurs blessures.

Le Capitaine Leland Stottlemeyer prouve à plus d'une reprise son attachement profond pour Monk, son amitié sincère malgré son agacement pour ses tics envahissants. Il est toujours dubitatif quant aux théories de Monk mais il finit par lui faire confiance. En dépit des aléas de la vie (sa vie sentimentale mettra du temps avant de trouver un équilibre) les deux compagnons seront toujours là l'un pour l'autre. S'ils ne peuvent partager de repas dans les restaurants ou de franches rigolades ils en réalisent d'autant plus la qualité de leur relation. Celle-ci se révèle plus profonde qu'une quelconque accointance, celles qu'on oublie rapidement malgré le nombre d'heures passées ensemble. Monk n'a d'ailleurs jamais eu de place pour la camaraderie, il s'entoure d'amis véritables ou reste seul !
Le lieutenant Randall Disher : un personnage décalé, il semble si naïf qu'on s'étonne toujours de le trouver au beau milieu d'une enquête de police. Pourtant, ce qu'on lui demande il le fait toujours bien. Chaque personnage souffre donc de l'image qu'a la société de lui. Cet amoureux de musique voit le monde d'un regard si désintéressé qu'il devient très touchant.
 
Il  est déconnecté de la réalité, un peu comme Monk , c'est le capitaine qui l'aide à garder les pieds sur terre, comme Natalie le fait pour Adrien.  Ils forment un groupe hétérogène mais uni d'individus rejetés par la société. Ce petit clan se protège du regard des autres. Ensemble, ils ont le courage d'évoluer, ils se reconstruisent peu à peu. Randy peut enfin voler de ses propres ailes après le final, Monk trouve une raison de vivre, le capitaine se marie, Natalie présente le Lieutenant Steven Albright à Julie (qui étudie à Berkeley)...
Tout est bien qui finit bien, le final fait honneur à Monk. Le Emmy award de Randy Newman pour la meilleure musique originale permet à la série de finir sur une bonne note. Tout est parfait.
Merci  Andy Breckman, crétaeur de Monk ! Merci
USA network, chaîne câblée (
Monk, Dead Zone, Les 4400)
Mercy Tony Shalhoub...
Je m'éclipse, je dois nettoyer mon clavier...